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Cet obscur objet

1 novembre 2021
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J’ai fait un régime mais j’ai toujours un gros cul. Il faudrait que je perde 5 kilos supplémentaires.

Ouais, je sais que je ne suis pas en surpoids, mais il faudrait que je me muscle parce que je suis grasse.

Non mais tu ne m’as pas vu sous mes vêtements : j’ai des vergetures, les seins qui tombent et la peau flasque.

Tu penses que je suis bien parce que je sais masquer mes bourrelets aux hanches ! Hors de question que je me mette en maillot de bain devant tout le monde !

Je ne mets pas de jupe parce que j’ai de gros genoux.

J’ai de la cellulite, c’est affreux. J’ai des rides. J’ai des cheveux blancs. J’ai la peau qui marque. J’ai des gros bras. J’ai un double-menton.

Mentalement chargées

On s’y reconnait toutes, n’est-ce pas ?

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Je dois perdre du poids. Je dois faire du sport. Je dois boire beaucoup d’eau. Je dois aller chez l’esthéticienne me faire arracher ou brûler les poils. Je dois aller chez le coiffeur. Je dois acheter des produits sans sucre, sans gras, sans additifs. Je dois me maquiller. Je dois m’habiller avec soin. Je dois sourire.

Je dois faire jeune mais pas trop. Je dois être belle mais naturelle. Je dois être indépendante mais disponible. Je dois être exigeante mais tolérante. Je dois être patiente mais avancer. Je dois être honnête mais diplomate.

Je dois me prendre en main. Je dois prendre soin de moi. Je dois me respecter. Je dois faire des efforts. Je dois maigrir. Je dois apprendre. Je dois me soumettre. Je dois fermer ma gueule.

La guerre de 100 ans

Je dois perdre 60 kilos. J’arrête le sucre. Je fais une thérapie. Je pleure beaucoup. Je romps avec certaines personnes. Je rencontre d’autres personnes. Je me trompe. Je me remets en question. Je recommence. Je ne me précipite pas. Le temps passe et ça me fait peur. Mais il ne faut pas le dire.

Je teste le jeûne : un peu mais pas trop. Je partage mes expériences : un peu mais pas trop. Attention aux autres, il ne faut pas les choquer. Je dois changer sans déranger.

J’achète du faux sucre à 15 euros le kilo. J’achète de la farine à 15 euros les 400 grammes. Ca coûte cher un gâteau keto mais il faut savoir faire des sacrifices. Je marche 9 kilomètres par jour. Je vais à la piscine une voire deux fois par semaine. Je mets de la crème sur mon corps. J’ingère du collagène tous les jours.

J’ai perdu 45 kilos et je ne devrais pas m’en contenter. J’ai toujours du ventre et un gros cul. Et au fond de moi, je sais pertinemment que tout cela ne sera jamais suffisant.

Ca ne sera jamais suffisant tant que je me considèrerai comme un objet de désir. Tant que je plaquerai sur moi un regard qui n’est pas le mien mas celui qui m’a été inculqué. Tant que je ne me regarderai pas comme un sujet, je n’accèderai pas à la paix. Ca ne sera jamais suffisant parce que je serai toujours un être vivant et jamais un objet. Cette guerre contre moi-même peut durer 100 ans, je la perdrai quand même.

On ne peut pas être un objet. Un objet est immobile, éternel, sans vie, sans aspérité, sans temps, sans espace, sans relief, sans odeur, sans douleur, sans paradoxe, sans nuance, sans évolution, sans émotion.

On ne peut pas se regarder comme un objet en appliquant une grille de critères de beauté comme on le ferait avec un vase antique. Ah, il y a une brèche, il perd de sa valeur ! Dommage, c’était une jolie pièce !

On ne peut pas avoir le corps d’une fille de 15 ans quand on en a 30 ou 45, même quand on en a 16.

Insoumission

Qui peut se permettre de nous dire qu’on a trop de cellulite ? Qui peut oser nous humilier de la sorte en nous réduisant à une enveloppe jugeable sur des critères aussi absurdes ? Beurk, t’as des poils, c’est dégueulasse !

Au nom de quoi accepte-t-on de nous considérer nous-mêmes avec ce regard déshumanisant ? Comment peut-on accepter d’être aussi soumises à des normes aussi violentes ?

Je suis une femme, un être humain. Je suis tout court. Je n’ai pas besoin d’être qualifiée, d’être estimée. Je n’ai pas à être considérée comme un putain de vase. Je n’ai rien à assumer, à accepter, à tolérer en moi. Je n’ai aucun compromis à faire parce que faire un compromis, s’assumer telle qu’on est, c’est encore se chosifier en se disant « j’accepte de ne pas être un objet parfait ».

Je suis tout court et c’est ce qui me rend belle. J’en ai rien à foutre que les autres soient d’accord ou non. Moi, dans le miroir, tous les matins, je m’aime. Je me reconnais et je me trouve encore plus belle que la veille. Ce n’est pas de l’arrogance ou de l’orgueil, c’est de la sérénité, de la paix intérieure. Je suis moi. C’est super d’être moi.  Je ne veux pas être quelqu’un d’autre. Je ne veux pas être autre chose que moi. Je ne me soumets à aucun regard de jugement. Jugez autant que vous le voulez, cela ne m’atteint plus. C’est fini. Je pèse 85 kilos et je porte une mini-jupe, parce que ça me va bien. Je n’emmerde même pas les autres. Je les plains.

Je l’entends

Le bonheur arrive. Je l’entends à ma porte. Il me dit tout bas que tout va bien, que je n’ai rien à changer, rien à accepter, rien à renier. Le bonheur me dit de rire, d’aimer, de désirer, de m’affirmer, de réfléchir, de partager et … de manger ! Le bonheur me dit que j’ai le droit de vivre telle que je suis et de faire mes propres choix. Parce que je suis libre de le faire.

Cet obscur objet du désir qu’est la femme n’existe plus. Nous, nous existons.

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